Alors que la Syrie entre dans sa sixième année de guerre, le problème des réfugiés a longtemps été placé dans l’agenda du monde. En fait, utiliser le mot « problème » en parlant de cette question ne peut pas être tout à fait éthique puisque, comme nous le savons tous, ce n’est pas un sujet qui peut être considéré comme un problème d'alcool, de drogue, de trafic ou une dépendance à Internet : les gens qui traversent ce processus ne l’avaient peut-être jamais imaginé. Ces gens traversent un mode de vie qu’ils n’auraient jamais deviné puisque les gens ne peuvent pas prévoir le sort qui les attend. Tout comme les millions de Syriens qui poursuivaient tranquillement leur vie en paix avec leurs familles et avaient leurs propres routines, idéaux, buts, des souhaits et des plans dans le passé n’étaient pas conscients de ce qu’ils rencontreraient.
Sans aucun doute, « le statut de réfugié » est une étiquette que chaque personne dans le monde risque de porter un jour. C’est un statut qui peut ne pas être trop loin de ceux d'entre nous qui vivent dans une géographie stratégique et extrêmement risquée juste à côté du Moyen-Orient, au centre du triangle Balkans-Caucase-Moyen-Orient.
Aujourd'hui, le monde, en particulier les pays de l'UE, passent par une phase de test sérieux. Ceci est une phase où les attributs humains, de conscience et de justice des pays sont en cours d’épreuve.
La Turquie est sans aucun doute le premier pays parmi ceux dans le monde qui a réussi à passer cette phase de test de la meilleure façon qu'elle puisse faire. Comme chacun le sait, le pays accueille maintenant 2,7 millions de réfugiés syriens sans avoir de soutien ou d’aide de quelque part. La Turquie a établi des villes comprenant des tentes pour les réfugiés et par la suite, des zones d'accueil avec des maisons préfabriquées. Ces personnes sont en mesure de surmonter les problèmes d'alimentation, d'habillement, d'éducation et de santé grâce à la carte d'identité de réfugié qui leur est fournie. Il y a environ 450 écoles à travers le pays où les enfants réfugiés syriens peuvent recevoir une éducation.
La position ferme de la Turquie dans la poursuite de son attitude accueillante est digne de respect. Les motivations fondamentales qui sous-tendent une telle attitude sont la générosité demandée par les valeurs morales de l'Islam, les sentiments de fraternité énoncés dans le Coran, l'esprit d’Ansar-Muhajirun [Les Emigrants et les Aides] dans la vie de notre Prophète (pbsl), la responsabilité morale héritée des ancêtres qui ont servi en tant que leaders sur ces terres pendant des siècles et la bonne moralité du peuple turc. En fait, une société ayant de telles caractéristiques se distinguera certainement de l'attitude égoïste, cruelle et impitoyable de ces sociétés qui ne présentent pas ces caractéristiques concernant les réfugiés.
Les écrans de télévision sont inondés par les photos de ces pauvres gens interceptés par le gaz lacrymogène ou des canons à eau, battus, poussés, et privés de nourriture et d'eau, trébuchés et empêchés avec des barbelés placés devant eux ou laissés à mourir dans des embarcations de fortune en haute mer. Ce qui est douloureux est le fait que les gens s’habituent à voir toutes ces scènes d'une telle manière que les réactions sincères données les premiers jours à la suite de l'agitation des gens ont été remplacées par les sentiments d’ « habitude », puis d’ « indifférence. »
Il y a certainement quelques bonnes nouvelles et des démarches positives faites contre toute attente. En effet, les récentes négociations au sein du Conseil européen pour la résolution de la crise des réfugiés ont été relativement satisfaisantes. Il est certain que, en comparaison avec ce qui devrait être fait, l'UE n’a « disparu nulle part » en ce qui concerne la question des réfugiés ; cela a pris une bonne tournure compte tenu de la conjoncture actuelle. Martin Selmayr, le chef de cabinet de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, a fait une déclaration sur Twitter : « Des progrès dans les négociations difficiles du Conseil européen sur la résolution de la crise des réfugiés. »
La Turquie recevra 3 milliards € d'ici 2018 pour le logement des réfugiés syriens dans le cadre de l'accord issu des négociations ; la Turquie réadmettra tous les réfugiés qui s’installent illégalement sur les îles grecques, et tous ces réfugiés syriens seront renvoyés en Turquie alors que l'UE prendra le même nombre de réfugiés en provenance de Turquie. La motivation derrière cette réglementation est d'éviter l'immigration irrégulière et clandestine vers l'Europe.
En conséquence, tous les migrants illégaux qui ont voyagé sur les îles grecques par la Turquie commenceront probablement à être renvoyés en Turquie le 4 avril ; l'UE acceptera un réfugié syrien des camps de Turquie en échange de tout Syrien réadmis par la Turquie. L'objectif de l'UE est de mettre fin au flux de réfugiés en Europe et de lutter contre la traite des êtres humains, ce qui est la raison d'être de l'accord signé entre la Turquie et l'UE. Il est évident que - du point de vue de l'UE - une résolution à la crise sans la Turquie ne semble pas possible. L'accord a été critiqué par plusieurs personnes sur des plates-formes nationales ou internationales, considéré comme insuffisant ou incorrect.
Toutefois, lorsque l'accord est exécuté, les réfugiés traversant les îles grecques seront retournés en Turquie comme la nuit du 20 au 21 Mars. Ceux qui sont arrivés sur les îles grecques le 20 Mars avant minuit, resteront dans l'UE. Afin de veiller à cela, des points chauds seront établis sur les cinq îles par les autorités turques et grecques. Les réfugiés enregistrés dans ces points chauds seront réadmis en Turquie lors de l'accomplissement des procédures. Selon les termes de l'accord, la Turquie va envoyer 72.000 réfugiés à l'UE cette année. Cependant, le quota ne se limite pas à cela; après l'admission de 72.000 réfugiés par l'UE, la situation sera réévaluée.
Il est vrai que cet accord ne propose pas une solution radicale; cependant, il est aussi agréable de voir que l'Occident peut faire un pas, quoique de petite taille. Cela servira peut-être comme une étape à des solutions nouvelles et permanentes. La Turquie effectue cette étape afin d'éviter la perte de vie dont celle des femmes, des personnes âgées, des jeunes, des enfants, et de nombreuses personnes innocentes en haute mer.
D'autre part, il est d’une grande importance de venir avec de nouvelles idées pour trouver des solutions plus permanentes au problème. À cet égard, la participation des organisations internationales et des ONG est aussi essentielle autant que les mesures à prendre conjointement avec l'UE. Cependant, l'étape la plus importante est de stimuler la conscience des gens et de répandre l'amour, la tolérance, l'empathie, l'amitié et la fraternité. Il est tout à fait possible pour nous tous d’œuvrer aussi longtemps que nous sommes prêts à le faire.
Article d’Adnan Oktar sur EKurd Daily: