Après que le souverain eut découvert la vérité, une nouvelle vie commença pour le Prophète Joseph. Le souverain ordonna qu'on lui amenât le Prophète Joseph et lorsque ce dernier arriva, il lui donna une position importante à ses côtés, faisant de lui un conseiller de confiance.
Et le roi dit: "Amenez-le moi: je me le réserve pour moi-même." Et lorsqu'il lui eut parlé, il dit: "Tu es dès aujourd'hui près de nous, en une position d'autorité et de confiance." Et [Joseph dit: "Assigne-moi les dépôts du territoire: je suis bon gardien et connaisseur." Ainsi avons-nous affermi (l'autorité de) Joseph dans ce territoire et il s'y installait là où il le voulait.
Et le roi dit: "Amenez-le moi: je me le réserve pour moi-même." Et lorsqu'il lui eut parlé, il dit: "Tu es dès aujourd'hui près de nous, en une position d'autorité et de confiance." Et [Joseph dit: "Assigne-moi les dépôts du territoire: je suis bon gardien et connaisseur." Ainsi avons-nous affermi (l'autorité de) Joseph dans ce territoire et il s'y installait là où il le voulait. Nous touchons de Notre miséricorde qui Nous voulons et ne faisons pas perdre aux hommes de bien le mérite [de leurs œuvres].(Sourate Joseph, 54-57)
Pour rappeler les événements, le Prophète Joseph était parti en Égypte en tant qu'esclave, puis avait été jeté en prison pour le motif sans fondement de tentative d'adultère. Cependant, Allah réalisa un changement qui aurait paru "impossible" vu de l'extérieur, faisant du Prophète Joseph un indispensable du gouvernement égyptien.
La réalisation des choses qui nous paraissent impossibles appartient au domaine de la sagesse et de l'immensité d'Allah. En outre, le Coran nous informe:
… Combien de fois une troupe peu nombreuse a, par la grâce d'Allah, vaincu une troupe très nombreuse! … (Sourate al-Baqarah: 249)
Comme un miracle de la foi pour les croyants, Allah les secourt de situations qui peuvent paraître très difficiles voire impossibles et s'oppose à ceux qui Le renie. Le seul devoir qui incombe aux croyants est de ne jamais abandonner leur foi en la promesse d'Allah, de se soumettre à Sa volonté et de Lui faire confiance.
Une ancienne image illustrant les sept années d'abondance avant la famine (image du haut)
Alors [Joseph dit]: Vous sèmerez pendant sept années consécutives. Tout ce que vous aurez moissonné, laissez-le en épi, sauf le peu que vous consommerez. Viendront ensuite sept année de disette qui consommeront tout ce que vous aurez amassé pour elles sauf le peu que vous aurez réservé [comme semence]. Puis, viendra après cela une année où les gens seront secourus [par la pluie] et iront au pressoir. (Sourate Joseph,,47-49)
A gauche, une représentation murale qui dépeint le peuple affamé d'Égypte
A droite une ancienne inscription égyptienne (de 1700-1550 avant J.-C.) explique
précisément les sept années de famine au temps du Prophète Joseph.
Des images d'une terre cultivée avant et après la famine tirées d'un film sur la vie du Prophète Joseph
Pour ceux qui sont éloignés de la religion, leur seul désir est de posséder la force et le pouvoir en ce bas monde, de posséder des biens et de la richesse et d'influencer la manière dont cette dernière est dépensée. C'est le but pour lequel ils se battent et auquel ils consacrent leur vie. Cependant, comme nous l'avons vu, Allah fit sortir le Prophète Joseph de prison et le combla immédiatement de ses bienfaits. C'est là où est la sagesse d'Allah quand Il rappelle l'au-delà à la fin du verset, juste après qu'Il eut donné au Prophète Joseph pouvoir, influence et propriété.
Un relief et une peinture montrant le gouvernement égyptien stocker une part des récoltes des années d'abondance et la distribution de provision pendant la famine.
Des peintures historiques décrivant les sept dures années de famine
Nous devons ainsi nous rappeler que les biens et le rang dont on bénéficie ici-bas n'ont aucune importance et que ce que nous devons regarder, c'est la vie après la mort. Toutefois, dans la dernière phrase du verset, où nous sommes informés sur ce point et du fait que la récompense dans l'au-delà sera extrêmement bénéfique, on apprend aussi que cette récompense ne sera destinée qu'aux croyants et à ceux qui craignent Allah. Il est donc hors de question pour ceux qui ne possèdent pas ces caractéristiques d'espérer une récompense agréable dans l'au-delà. C'est de cette manière qu'Allah tourne le regard des gens dans la direction de l'au-delà.
On apprend une autre vérité dans l'histoire du Prophète Joseph, Allah nous dit dans le Coran:
Chaque situation difficile est certes accompagnée d'une situation aisée. Oui, chaque situation difficile est certes accompagnée d'une situation aisée. (Sourate as-Sarh, 5-6)
Cette sourate nous apprend qu'Allah promet aux croyants qu'à la suite de chaque épreuve Il a prévu une période d'aisance.
La vie du Prophète Joseph abonde en exemples de ce genre. La manière dont il fut délivré du puits et accueilli au sein d'une bonne famille et la manière dont il fut placé à la tête du Trésor alors qu'il était en prison sont autant de preuves évidentes de la façon dont Allah fait suivre chaque épreuve et difficulté de réconfort et de soulagement.
Comme mentionné plus haut, le Prophète Joseph devint le responsable du Trésor d'Égypte. Peu de temps après, ses frères, qui l'avaient jeté dans le puits, vinrent en Égypte pour faire du commerce. Ils le rencontrèrent mais ne le reconnurent pas. Le Prophète Joseph, par contre, les reconnut aussitôt et prépara un plan très astucieux. Il leur offrit des provisions et les accueillit chaleureusement afin de les influencer pour faire ce qu'il avait prévu. Son but était en réalité de récupérer son jeune frère:
Et les frères de Joseph vinrent et entrèrent auprès de lui. Il les reconnut, mais eux ne le reconnurent pas. Et quand il leur eut fourni leur provision, il dit: "Amenez-moi un frère que vous avez de votre père. Ne voyez-vous pas que je donne la pleine mesure et que je suis le meilleur des hôtes? Et si vous ne l'amenez pas, alors il n'y aura plus de provision pour vous, chez moi, et vous ne m'approcherez plus." (Sourate Joseph, 58-60)
Hz. Grâce à la juste interprétation du
Prophète Joseph, des vivres furent distribuées
durant la famine moyennant paiement. Les gens
allaient en Égypte pour y faire du commerce.
La peinture du dessus et les images égyptiennes
à droite dépeignent ce commerce.
On voit d'après ces versets que le Prophète Joseph encouragea les désirs de ses frères en montrant clairement qu'il était juste. Ces événements se déroulèrent parfaitement comme prévu. En outre, il leur expliqua qu'ils ne gagneraient rien de ce qu'ils attendaient et qu'ils n'auraient pas la chance d'une autre audience s'ils ne lui amenaient pas leur jeune frère. Ainsi, il suscita en eux la perspective inquiétante de difficultés éventuelles.
En effet, les paroles du Prophète Joseph firent un effet immédiat sur ses frères. Étant donné son pouvoir et son rang, ils étaient convaincus que ses paroles n'étaient pas des paroles en l'air et décidèrent de faire tout ce qui était en leur pouvoir pour ramener leur frère.
Ils dirent: "Nous essayerons de persuader son père. Certes, nous le ferons." (Sourate Joseph, 61)
La stratégie employée ici par le Prophète Joseph était très ingénieuse. S'il ne leur avait pas proposé d'avantage matériel de cette manière, s'il ne leur avait pas imposé plusieurs conditions, ils auraient été réticents et n'auraient pas amené leur frère. En conséquence, le Prophète Joseph ne les laissa pas complètement s'occuper de l'affaire et mit sur pied un plan auquel ils ne pouvaient absolument pas résister.
En plus de toutes ces mesures intelligentes, le Prophète Joseph fit encore une autre démarche comme garantie supplémentaire. Avant que ses frères ne quittassent l'Égypte, il plaça l'argent qu'il avait reçu d'eux en échange de provisions dans leurs affaires quand ils eurent le dos tourné. En leur donnant à la fois les marchandises et l'argent qu'ils avaient donné pour celles-ci, le Prophète Joseph leur donnait un avantage matériel supplémentaire. Ce passage est décrit ainsi dans le Coran:
Et il dit à ses serviteurs: "Remettez leurs marchandises dans leurs sacs; peut-être les reconnaîtront-ils quand ils seront de retour vers leur famille et peut-être qu'ils reviendront." (Sourate Joseph, 62)
Voici, la leçon que les Musulmans peuvent tirer de cette série de mesures; quand on veut passer un accord avec des individus de peu de confiance, qui ont une foi et une morale faibles, il est primordial de prendre toutes les mesures possibles contre l'éventualité de la rupture de leur engagement et pour s'assurer qu'ils feront ce qu'on leur demande. Ce n'est pas aux croyants de laisser l'initiative à ceux qui manquent de foi.
Il est bien connu que l'une des caractéristiques des gens ignorants est leur attachement profond aux biens matériels et leur façon de faire des courbettes à toute personne ou chose qui peut leur apporter des avantages. Les frères du Prophète Joseph ne pouvaient supporter l'idée de perdre les possibilités matérielles qu'il leur avait fait miroiter.
Dès qu'ils quittèrent l'Égypte, ils se rendirent aussitôt auprès de leur père pour lui demander de leur confier leur petit frère, lui promettant qu'ils allaient le protéger:
Et lorsqu'ils revinrent à leur père, ils dirent: "Ô mon père, il nous sera refusé [à l'avenir] de nous ravitailler [en grain], Envoie donc, avec nous notre frère, afin que nous obtenions des provisions. Nous le surveillerons bien." (Sourate Joseph, 63)
Cependant, leur père ne leur fit pas confiance:
Il dit: "Vais-je vous le confier comme auparavant, je vous ai confié son frère? Mais Allah est le meilleur Gardien, et Il est le plus Miséricordieux des miséricordieux!" (Sourate Joseph, 64)
Remarquons que le Prophète Jacob et le Prophète Joseph se souvenaient tous deux d'Allah et priaient Allah juste après avoir pris la parole. C'est un exemple pour les croyants, montrant qu'ils doivent toujours se souvenir d'Allah et ne jamais l'oublier.
Toutefois les frères du Prophète Joseph avaient une envie féroce de ces gains matériels. C'est pourquoi ils ne reculèrent devant rien pour faire changer leur père d'avis:
Et lorsqu'ils ouvrirent leurs bagages, ils trouvèrent qu'on leur avait rendu leurs marchandises. Ils dirent: "Ô notre père. Que désirons-nous [de plus]? Voici que nos marchandises nous ont été rendues. Et ainsi nous approvisionnerons notre famille, nous veillerons à la sécurité de notre frère et nous nous ajouterons la charge d'un chameau et c'est une charge facile." (Sourate Joseph, 65)
Comme le Prophète Jacob ne leur faisait pas confiance il leur demanda de promettre de ramener leur frère:
Il dit: "Jamais je ne l'enverrai avec vous, jusqu'à ce que vous m'apportiez l'engagement formel au nom d'Allah que vous me le ramènerez à moins que vous ne soyez cernés." Lorsqu'ils lui eurent apporté l'engagement, il dit: "Allah est garant de ce que nous disons."(Sourate Joseph, 66)
Cette peinture suggère le moment où, des années après avoir jeté Joseph l'enfant dans le puits, les frères se trouvèrent en sa présence, en tant que Prophète, pour prendre des provisions.
Le rappel fait par le Prophète Jacob qui stipulait qu'Allah était témoin de leur contrat et qu'Il était son gardien est le signe d'une grande sagesse. Cela nous montre que demander à des gens de peu de foi de jurer au nom d'Allah est un moyen efficace de les guider vers ce qui est le mieux pour eux, car même s'ils n'avaient qu'un peu de crainte d'Allah, ils garderaient cela à l'esprit et agiraient honnêtement.
Après avoir fait jurer ses fils, le Prophète Jacob leur conseilla d'être prudent et de rentrer en Égypte par des portes différentes.
Il dit: "O mon fils, n'entrez pas par une seule porte, mais entrez par portes séparées. Je ne peux cependant vous être d'aucune utilité contre les desseins d'Allah. La décision n'appartient qu'à Allah: en Lui je place ma confiance. Et que ceux qui placent leur confiance la placent en Lui. (Sourate Joseph, 67)
Le conseil que donne le Prophète Jacob est très important. Ces versets mettent en évidence que les croyants doivent être très prudents, calculer tous les dangers et prendre des précautions particulières.
Pourtant, en même temps, le Prophète Jacob leur rappela qu'on ne peut rien contre les décrets d'Allah. Il expliqua qu'Allah seul décide de ce qui va se passer, que si Allah veut quelque chose, on ne peut rien pour s'en préserver, et qu'il est donc nécessaire de se soumettre à Sa volonté. Ce sont certes des rappels extrêmement précieux. Ici on voit apparaître l'idée de la soumission à Allah que les Musulmans doivent adopter dans le sens le plus large du terme. Les idées populaires sur la destinée et la soumission sont en fait erronées. Certains s'imaginent que les événements se produisent à cause des mesures qu'ils ont prises ou qu'ils peuvent faire se passer d'autres choses. D'autres ont un concept de la soumission à Allah erroné, c'est-à-dire: "ce qui va arriver est déjà prédestiné donc on n'a pas besoin de faire quoique ce soit."
Les deux concepts sont faux. Les êtres humains sont responsables des décisions qu'ils prennent quelle que soit la situation dans laquelle ils se trouvent, pour faire avancer les choses, mais on ne doit pas oublier que l'issue en revient à Allah. Naturellement, les précautions ne détermineront pas l'issue d'un événement mais elles doivent être prises soigneusement et scrupuleusement comme un acte de foi.
Le Prophète Jacob était totalement croyant, et il était conscient de ce secret. La façon dont il mentionnait Allah quand il parlait et dont il considérait les aspects cachés des choses est une indication de sa crainte d'Allah. On nous dit dans un verset que le prophète Jacob était un serviteur qui possédait le savoir:
Etant entrés comme leur père le leur avait commandé [cela] ne leur servit à rien contre (les décrets de) Allah. Ce n'était [au reste] qu'une précaution que Jacob avait jugé [de leur recommander]. Il avait pleine connaissance de ce que Nous lui avions enseigné. Mais la plupart des gens ne savent pas.(Sourate Joseph, 68)
Les frères du Prophète Joseph revinrent en Egypte accompagnés de leur jeune frère et rencontrèrent à nouveau le Prophète Joseph. Là, le Prophète Joseph prit à part son jeune frère et lui révéla son identité.
Et quand ils furent entrés auprès de Joseph, [celui-ci] retint son frère auprès de lui en disant: "Je suis ton frère. Ne te chagrine donc pas pour ce qu'ils faisaient." (Sourate Joseph, 69)
On apprend par le Prophète Joseph que ses frères lui causèrent des difficultés et de la détresse, ce qui est une autre indication de la façon dont ils étaient éloignés de la religion.
Après avoir rencontré son jeune frère, le Prophète Joseph usa d'une astuce afin de le ramener près de lui. C'est ainsi qu'il vint au secours de son jeune frère et le sauva des épreuves que les autres frères lui infligeaient. L'habileté du Prophète Joseph est décrite en ces termes dans les versets suivants:
Puis, quand il leur eut fourni leurs provisions, il mit la coupe dans le sac de son frère. Ensuite un crieur annonça: "Caravaniers! Vous êtes des voleurs." [Joseph] commença par les sacs des autres avant celui de son frère; puis il la fit sortir du sac de son frère. Ainsi suggérâmes-Nous cet artifice à Joseph. Car il ne pouvait pas se saisir de son frère, selon la justice du roi, à moins qu'Allah ne l'eût voulu. Nous élevons en rang qui Nous voulons. Et au-dessus de tout homme détenant la science il y a un savant [plus docte que lui]. (Sourate Joseph, 70-76)
Les lois en usage en Égypte n'auraient pas permis que le Prophète Joseph gardât son frère avec lui, mais grâce à son plan astucieux ce fut chose possible. Son plan consista à cacher un gobelet dans les affaires de son jeune frère.
Ensuite, un de ses hommes interpella les frères du Prophète Joseph de façon à les mettre dans un état de culpabilité et de stress. De plus, on leur déclara que le gobelet volé appartenait au souverain et qu'on récompenserait celui qui le retrouverait d'un chargement de chameau. On voulait ainsi donner l'impression qu'il s'agissait d'un incident majeur afin de ne pas faire soupçonner que tout cela n'était qu'un stratagème voulu.
Des images montrant le gobelet "perdu" du souverain qu'on
retrouve dans les bagages du frère du Prophète Joseph
Ensuite, l'homme leur demanda quelle était la peine qui serait encourue par celui qu'on découvrirait en possession du gobelet. Selon la loi, le propriétaire du sac où le gobelet serait trouvé devrait être arrêté et détenu. Et afin de ne pas révéler que tout cela n'était qu'un stratagème, l'homme ne fouilla pas le sac du jeune frère en premier mais commença par les affaires des autres.
Quand le gobelet fut retrouvé dans les affaires du jeune frère, les autres acceptèrent immédiatement la situation, le traitant de menteur et proférant une calomnie qu'ils avaient déjà lancée à l'égard du Prophète Joseph:
Ils dirent: "S'il a commis un vol, un frère à lui auparavant a volé aussi." … (Sourate Joseph, 77)
Néanmoins, les frères savaient sciemment qu'il n'aurait jamais volé, que c'était une personne honnête. Selon les critères moraux établis dans le Coran, les croyants doivent penser du bien les uns des autres et doivent se protéger les uns les autres contre les diffamateurs. Le fait que les frères ne défendirent même pas leur frère innocent et qu'en plus ils impliquèrent le Prophète Joseph est un indice sur leur nature fausse et hypocrite.
Le Prophète Joseph fit preuve d'une grande patience face à ce comportement.
… Mais Joseph tint sa pensée secrète, et ne leur dévoila pas. Il dit [en lui-même]: "Votre position est bien pire encore! Et Allah connaît mieux ce que vous décrivez." (Sourate Joseph, 77)
L'attitude du Prophète Joseph est un exemple de soumission à la volonté d'Allah et d'intelligence. La plupart des gens ignorants s'énervent facilement quand ils entendent la moindre parole blessante proférée contre eux et réagissent d'une manière émotive. Et pourtant, le Prophète Joseph garda ses pensées secrètes, comme le verset nous le dit, en d'autres mots, il ne fit pas connaître ses sentiments intimes aux autres.
Les événements qui s'en suivirent sont racontés ci-dessous:
Ils dirent: "Ô Al ‘Aziz, il a un père très vieux; saisis-toi donc de l'un de nous, à sa place. Nous voyons que tu es vraiment du nombre des gens bienfaisants." Il dit: "qu'Allah nous garde de prendre un autre que celui chez qui nous avons trouvé notre bien! Nous serions alors vraiment injustes." Puis, lorsqu'ils eurent perdu tout espoir [de ramener Benjamin] ils se concertèrent en secret. Leur aîné dit: "Ne savez-vous pas que votre père a pris de vous un engagement formel au nom d'Allah, et que déjà vous y avez manqué autrefois à propos de Joseph? Je ne quitterai point le territoire, jusqu'à ce que mon père me le permette ou qu'Allah juge en ma faveur, et Il est le Meilleur des juges." (Sourate Joseph, 78-80)
Le moment où le gobelet fut trouvé selon un film
sur le Prophète Joseph. Dans des circonstances normales
le Prophète Joseph n'aurait jamais pu garder son frère avec lui
mais le plan qu'il avait établi le lui permit.
On peut constater que l'un des frères eut plus de conscience que les autres. De fait, une situation similaire s'était produite du temps où ils avaient jeté Joseph dans le puits et la plupart de ses frères voulaient le tuer, sauf l'un des frères qui avait proposé: Ne tuez pas Joseph, mais jetez-le si vous êtes disposés à agir, au fond du puits afin que quelque caravane le recueille.(Sourate Joseph, 10)
Il se peut que ce soit le même frère qui soit intervenu dans les deux cas mais Allah seul le sait. Ce qu'on peut comparer ici, c'est un tempérament humain intéressant; un tempérament qui comprend avec sa conscience que ce qui l'entoure est mal, mais qui ne peut pas s'élever suffisamment contre ces événements et qui n'est capable de faire qu'une maigre opposition. Bien que ce soit un modèle bien plus positif que les gens cruels sans aucune conscience, c'est encore largement insuffisant comparé au caractère d'un croyant sincère.
Le caractère d'un croyant est tel qu'il requiert une intervention prompte et immédiate quand il voit un comportement contraire à la religion d'Allah, ou empreint de cruauté ou de manque de conscience. Le croyant n'est jamais impuissant, il ne tombe jamais dans "la psychologie de groupe" ou sous l'influence de la majorité cruelle qui l'entoure et ne fait jamais de compromis sur ce qui est bien. Il ne dévie jamais du chemin d'Allah, même si tout le monde autour de lui le fait.
La conversation entre les frères du Prophète Joseph est relatée dans le Coran en ces termes:
"Retournez à votre père et dites: "O notre père, ton fils a volé. Et nous n'attestons que ce que nous savons. Et nous n'étions nullement au courant de l'inconnu." "Et interroge la ville où nous étions, ainsi que la caravane dans laquelle nous sommes arrivés. Nous disons réellement la vérité." Alors [Jacob] dit: "Vos âmes plutôt vous ont inspiré [d'entreprendre] quelque chose!... Oh! Belle patience. Il se peut qu'Allah me les ramènera tous les deux. Car c'est Lui l'Omniscient, le Sage."(Sourate Joseph, 81-83)
En examinant le récit de près, on voit bien que les frères croyaient vraiment que leur jeune frère avait commis un vol. Néanmoins, comme nous l'avons déjà mentionné, c'est une grave erreur de penser en ces termes. Ils auraient dû savoir qu'un croyant ne ferait jamais, au grand jamais, une telle chose, et ils auraient dû penser le meilleur de leur frère et supposer qu'il y avait erreur sur la personne. En fait, le Prophète Jacob se comporta exactement comme on peut l'attendre d'un croyant. Il n'admit jamais la possibilité que son fils pût être un voleur puisqu'il savait qu'il était un croyant sincère et qu'il craignait Allah. Parallèlement à cela, comme il savait que ses autres fils avaient une morale bien éloignée de la religion, il refusa de leur faire confiance et supposa que leurs transactions peu scrupuleuses étaient à la base de ce problème, qu'il y avait fourberie de leur part.
La soumission du Prophète Jacob à la volonté d'Allah est un autre exemple de la conduite droite qui convient à un croyant. Bien qu'il pensât que ce qui était arrivé était une erreur et qu'il y avait un piège là-dessous, il se tourna immédiatement vers Allah et chercha patiemment de l'aide auprès de Lui. Encore une fois, il est clair que ce qui lui convenait, c'était la patience. Le Prophète Jacob ne perdit jamais espoir. Il espérait même qu'Allah les réunît: le Prophète Joseph, son jeune frère et lui dans un avenir proche.
En outre, croire qu'il y a du bien dans chaque événement est l'une des caractéristiques déterminantes des croyants. La preuve qu'il y avait du bien dans la conviction des autres frères que leur jeune frère avait volé, réside dans le fait qu'ils furent facilement convaincus de laisser leur plus jeune frère en Égypte sans créer de difficultés pour le Prophète Joseph.
Par contre, le Prophète Jacob connaissait ce secret, à savoir qu'Allah est créateur de toutes choses et les a redues favorables aux croyants. En fait, l'aspect le plus frappant de son attitude, c'est le fait qu'il ne faisait pas de lien entre les événements et les causes matérielles, qu'il ne réfléchissait pas selon une logique superficielle de cause à effet, et qu'il savait que tout est sans aucun doute sous le contrôle d'Allah. Cet exemple nous montre qu'il ne faut perdre espoir en Allah, quoiqu'il arrive, quelle que soit la difficulté. On se doit d'être toujours plein d'espoir et de s'en remettre à Allah.
Cependant, le Prophète Jacob se trouvait dans une situation intéressante. Bien qu'il sût qu'Allah était créateur de tout, il n'hésitait pas à éprouver de la tristesse à l'encontre du Prophète Joseph et de son frère. C'était cela, son épreuve. L'expérience était si éprouvante qu'en fait, comme nous le révèle le Coran, les yeux de Jacob devinrent blancs à cause du chagrin que la perte du Prophète Joseph lui avait occasionné, c'est-à-dire qu'il devint aveugle. Ses fils l'avertirent qu'il pourrait tomber malade de chagrin, voire en mourir:
Et il se détourna d'eux et dit: "Que mon chagrin est grand pour Joseph!" Et ses yeux blanchirent d'affliction. Et il était accablé. Et Ils dirent: "Par Allah! Tu ne cesseras pas d'évoquer Joseph, jusqu'à ce que tu t'épuises ou que tu sois parmi les morts." Il dit: "Je ne me plains qu'à Allah de mon déchirement et de mon chagrin. Et, je sais de la part d'Allah, ce que vous ne savez pas." (Sourate Joseph, 84-86)
Ce verset nous indique que le chagrin peut amener à de sérieuses maladies. En réalité, dans le Coran, Allah nous dit de ne pas être chagriné ou triste. Lorsqu'on ne suit pas ces recommandations, les conséquences négatives se manifestent immédiatement. Mises à part les conséquences psychologiques, la tristesse a des répercussions graves sur le physique, telles que l'assombrissement du pourtour des yeux, la tension faciale, le blanchissement des cheveux ou les malaises etc.
Ensuite, le Prophète Jacob demanda à ses fils de partir à la recherche des nouvelles du Prophète Joseph et de son jeune frère:
"O mes fils! Partez et enquérez-vous de Joseph et de son frère. Et ne désespérez pas de la miséricorde d'Allah. Ce sont seulement les gens mécréants qui désespèrent de la miséricorde d'Allah." (Sourate Joseph, 87)
Il est important de noter ici que le Pophète Jacob était sûr que le Prophète Joseph était vivant. La raison de cette certitude était peut-être qu'Allah lui avait imparti un savoir spécial. Comme le précise le Coran, Allah peut donner à Ses prophètes et à Ses messagers des perceptions sensorielles puissantes, une sagesse exceptionnelle, une grande perspicacité, une prévoyance supérieure et une capacité à voir les événements futurs. C'est pourquoi il faut se fier à ceux qui ont reçu ce savoir, leur faire confiance et les suivre.
Un autre fait mis en valeur par ce verset est que les croyants doivent toujours espérer en Allah en toutes circonstances. Le Prophète Jacob ne perdit jamais l'espoir de revoir Joseph et son frère, et il conseilla à ses fils de ne jamais renoncer à garder espoir en Allah. Perdre l'espoir en Allah est un état d'esprit qui convient aux non-croyants et non aux fidèles.
Le Coran décrit la rencontre du Prophète Joseph et de ses frères comme suit:
Et lorsqu'ils s'introduisirent auprès de [Joseph] ils dirent: "Ô Al ‘Aziz, la famine nous a touchés, nous et notre famille; et nous venons avec une marchandise sans grande valeur. Donne-nous une pleine mesure, et fais-nous de la charité. Certes, Allah récompense les charitables!" (Sourate Joseph, 88)
Une image du Prophète Joseph révélant son identité à ses frères. Ils se souvinrent de ce qu'ils avaient fait, se repentirent et avouèrent leur faute.
Il vaut la peine de s'attarder sur l'attitude des frères à la fin du verset précédent. Après avoir demandé au Prophète Joseph d'être généreux envers eux, ils mentionnèrent Allah et le fait qu'Il récompense ceux qui donnent sans compter. C'est une indication de leur comportement hypocrite car bien qu'ils vécussent contrairement à la religion, qu'ils ne cherchassent point la satisfaction d'Allah, qu'ils oubliassent Allah dans leurs actions, ils se rappelaient Allah quand leur intérêt était en jeu.
Une image chrétienne des frères regrettant leur acte passé
Le fait qu'Allah aime ceux qui cherchent sincèrement Sa satisfaction est révélé dans le Coran, il n'y a pas de doute à ce sujet. Par contre, ceux qui ne tiennent aucun compte de ce qui plaît à Allah et L'appellent seulement quand leur propre intérêt est en jeu, s'imaginent toujours qu'ils peuvent influencer les autres malgré cette attitude.
Dans le verset suivant, le Prophète Joseph fit allusion à son identité lorsqu'il fut confronté à la demande d'aide de ses frères, sans porter aucun intérêt à ce qu'ils disaient.
Voilà comment il leur permit de comprendre qui il était réellement:
Il dit: "Savez-vous ce que vous avez fait de Joseph et de son frère alors que vous étiez ignorants? [injustes]" Ils dirent: "Est-ce que tu es… Certes, tu es Joseph!" Il dit: "Je suis Joseph, et voici mon frère. Certes, Allah nous a favorisés. Quiconque craint et patiente… Et très certainement, Allah ne fait pas perdre la récompense des bienfaisants." Ils dirent: "Par Allah! Vraiment Allah t'a préféré à nous et nous avons été fautifs." (Sourate Joseph, 89-91)
Comme on le voit d'après leurs déclarations ci-dessus, les frères du Prophète Joseph réussirent à conjecturer que l'intendant était le Prophète Joseph. Ils exprimèrent leur regret et déclarèrent qu'ils avaient commis une erreur. Ils acceptèrent que le Prophète Joseph soit élu par Allah et qu'Il l'avait choisi lui et pas eux. Un point important est souligné ici: le pouvoir de choisir appartient à Allah. Ce fait est également révélé dans le Coran en ces termes:
"Ton Seigneur crée ce qu'Il veut et Il choisit [pour les hommes] ce qui leur convient le mieux. Gloire à Allah! Il transcende ce qu'ils associent à Lui!" (Sourate al-Qasas, 68)
Le Prophète Joseph répondit à ses frères comme suit:
Il dit: "Pas de récrimination contre vous aujourd'hui! qu'Allah vous pardonne. C'est Lui le plus Miséricordieux des miséricordieux."(Sourate Joseph, 92)
Comme le montrent les versets précédents, bien que le Prophète Joseph fût dans une position qui lui aurait permis de punir ses frères ou de les maltraiter, il ne les questionna pas mais dit plutôt qu'il ne les condamnait pas. En fait, il demanda même à Allah de les pardonner, leur rappelant qu'Allah est le plus Miséricordieux des miséricordieux.
La conduite du Prophète Joseph en cet instant est un exemple pour tous les croyants. Dans de telles situations, les ignorants sont inspirés par la haine et agissent avec une logique de revanche. Les croyants, au contraire, refusent de privilégier leur intérêt personnel (c'est le cas du Prophète Joseph) et savent que le pardon est ce qui plaît plus à Allah. Ceci rappelle le verset 199 de la sourate al-A'raf:
Accepte ce qu'on t'offre de raisonnable, commande ce qui est convenable et éloigne-toi des ignorants.
Ils pardonnent les mauvais comportements et démontrent leur vertu morale supérieure en contrecarrant le mal par le bien.
Après avoir parlé ainsi à ses frères, le Prophète Joseph leur donna sa chemise et leur demanda de l‘emporter à leur père.
Emportez ma tunique que voici, et appliquez-la sur le visage de mon père: il recouvrera [aussitôt] la vue. Et amenez-moi toute votre famille. Et dès que la caravane franchit la frontière [de Canaan], leur père dit: "Je décèle, certes, l'odeur de Joseph, même si vous dites que je radote." Ils lui dirent: "Par Allah te voilà bien dans ton ancien égarement." (Sourate Joseph, 93-95)
Ce verset démontre que les frères pensaient que le Prophète Jacob avait commis une erreur en souffrant ainsi du manque de son fils. Voici la leçon qu'il faut tirer de cette attitude: émettre des jugements sur des apparences et des causes est une faute. C'est parce qu'Allah a parlé dans le Coran d'actions basées sur un savoir qui est accordé comme faveur spéciale. Par exemple, cette question est illustrée d'une façon détaillée dans l'histoire du Prophète Moïse qui rencontra un serviteur d'Allah qui était investi d'un savoir spécial.
De toute façon, Allah avait révélé que le Prophète Jacob était un serviteur investi d'un savoir spécial. Sa famille ne comprenait pas son comportement, qui reposait sur ce savoir, et envisageait les choses sous un angle superficiel, croyant qu'il était dans l'erreur.
En fait, après avoir reçu la chemise, le Prophète Jacob rappela à sa famille le savoir qu'Allah lui avait transmis.
Puis quand arriva le porteur de bonne annonce, il l'appliqua [la tunique] sur le visage de Jacob. Celui-ci recouvra [aussitôt] la vue, et dit: "Ne vous ai-je pas dit que je sais, par Allah, ce que vous ne savez pas." (Sourate Joseph, 96)
Comme nous l'avons vu, les paroles prononcées précédemment par le Prophète Joseph devinrent réalité. La maladie dont son père souffrait disparut lorsque ses fils passèrent la chemise sur ses yeux: il recouvra la vue et regagna donc sa santé. En outre, la révélation que le Prophète Jacob avait eue et son pressentiment se confirmèrent: il revit son fils Joseph. Cela indique bien que tous les deux étaient des fidèles dotés d'un savoir bien particulier.